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Honneur
à Toi, mon cher et vieil Ami,
Bien des lunes ont passé depuis notre dernière rencontre,
l'été dernier, et j'avoue avoir rarement été aussi occupé.
Il était donc temps pour moi de t'écrire cette lettre, afin
de te faire part des derniers événements touchant nos chers
amis.
Tu as du en avoir été averti, mais j'ai été absent de longues
semaines, l'automne dernier, en mission que j'étais pour l'Empereur.
La chose s'est relativement bien passée, suffisamment pour
que je revienne ici t'écrire ces quelques mots. Depuis, je
me consacre entièrement aux affaires de ma magistrature, qui
me prennent de plus en plus de temps par rapport à mon professorat,
et, je te l'avoue, il y a des moments où je me demande si
je pourrai vraiment assumer toutes ces responsabilités qui
m'incombent.
C'est à Ryu, devenu Capitaine de la Garde Pourpre du Shogun,
qu'a du incomber la difficile tâche d'annoncer la mort de
Mitsunaga, notre défunt compagnon, à sa famille. La chose
fut d'autant plus difficile que son corps n'a pu être retrouvé,
et que sa lame n'a pu leur être rendue. Nous savons tous deux
que cette lame ancestrale est à présent entre les mains de
ton peuple, et j'espère que nos deux nations pourront négocier
le retour du Cimeterre au Palais des Mitsunaga.
Les Seigneurs Gogenso Kaji-sama et Kinzoku-sama sont eux aussi
des plus affairés depuis leur accession aux statuts de Shogun
et de Champion d'Emeraude, et leur poste les contraint à passer
désormais la majorité de leur temps dans la Capitale Impériale.
Les affaires de notre Clan, du moins pour son administration
locale, relèvent désormais de la responsabilité des trois
autres maîtres du clan, Karasu, Kame et Wang Li Fei. Tous
se chargent de cette responsabilité avec honneur et efficacité.
Haito et Hayashi travaillent désormais au sein de l'Académie
Gogenso, Hayashi songeant de plus en plus à la prêtrise, et
Haito étant chargé de l'antenne locale de la Ligue Pourpre
au sein de l'Académie. ses talents d'ingénieur artificier
lui garantiront sans douter une place de plus en plus influente.
Zhang Liang et Yuko Natsumo, les Grands Erudits et protecteurs
du Savoir, sont eux aussi rentrés dans leur Temple, et j'ai
eu le plaisir de les revoir hier, ainsi que la plupart de
nos autres amis.
Car, comme tu peux le savoir, c'est demain, le 11 février
et Nouvel An Scarabée, qu'aura lieu le grand mariage entre
Gogenso Kaji, mon daymyo et nouveau Shogun du Khanistan de
l'Est, et la Princesse Pimiko, proche parente de l'Empereur
Misu Saicho. En fait, je souhaiterais profiter de cette correspondance
pour partager avec toi les quelques coutumes dont tu n'as
pas encore connaissance, comme le mariage en terre Scarabée.
Le mariage est par tradition l'un des plus grands événements
de la vie, et il est fêté avec toute l'importance qui lui
revient. De fait, l'union d'un couple en terre Scarabée se
déroule en 3 jours. Le premier jour, le marié vient, escorté
de ses proches, auprès de la demeure de la promise pour y
demander formellement et officiellement la main de sa future.
Un grand banquet est organisé alors par la famille et les
proches du mariés, ce qui occupe le premier soir. Second jour,
c'est au tour de la mariée, que le futur promis viendra chercher
dans son ancienne maison pour l'amener à sa nouvelle demeure,
son futur foyer. La mariée fait alors, ce matin là, ses adieux
à sa famille, et se rendra avec son promis et ses proches
dans le lieu dont elle sera la future maîtresse. Ce second
jour se clôt lui aussi par un repas, mais plus sobrement que
celui de la veille, car y sont mêlées les larmes de la mariée
alors qu'elle quitte sa maison. Troisième et dernier jour,
c'est là qu'a lieu la cérémonie officielle. Une grande fête
est organisée, la plus somptueuse possible, et les deux mariés
paraissent alors en public, dans leurs plus beaux atours.
Hier, le Seigneur Kaji s'est rendu dans la demeure de la famille
Pimiko, dans le plus grand apparat. Je faisais partie de sa
suite, ainsi que tous nos proches et amis. Nous étions escortés
de huit cohortes de soldats et de domestiques, tous chargés
de présents et de cadeaux pour la mariée. C'est avec le plus
grand honneur que nous fûmes recus par l'Empereur lui-même,
qui accorda, grâcieusement, sa permission pour l'union - et
qu'il assortit d'une heureuse et subtile bénédiction. La Princesse
était vétue de blanc, un kimono immaculé d'une blancheur d'une
rare pureté sur les épaules, et affichait un sourire silencieux
pendant toute la cérémonie.
Aujourd'hui, c'est avec une sobriété d'usage que la Princesse
Pimiko fut transportée, dans un splendide palanquin rouge
décoré d'or, jusqu'à sa nouvelle demeure, le Grand Palais
du Shogun. Je ne pus que l'entrevoir, mais elle était vêtue
d'un kimono rouge, couleur du bonheur et de la joie, aux innombrables
brodures d'or fins. A ses doigts, à ses oreilles, dans sa
chevelure, une subtile composition de fleurs et de bijoux
ne faisait que rehausser sa beauté, et j'avoue avoir eu le
coeur pincé à l'idée de voir ma chère, douce et impétueuse
amie d'enfance rentrer dans le rang par cette union. Ainsi
donc, je serai le dernier de nous deux à me marier.
J'écris ces quelques lignes alors que le repas vient de s'achever.
La musique est douce, et contraste avec la fanfare bruyante
de la veille et de ce matin. Je me prépare pour la journée
de demain, qui verra la véritable célébration du mariage,
un événement déjà considéré par tous les courtisans de la
Capitale comme l'une des célébrations les plus réussies de
la dernière décennie.
Je dois te laisser, à présent, mon cher et vieil Ami. Je t'écrirai
une autre lettre, dans les prochains jours, pour te raconter
la fin des festivités. En attendant, puisses-tu connaître
la Bénédiction de la Longévité, de l'Abondance, de la Beauté
et du Bonheur.
Ton vieil ami,
Samu Jiro-san.
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